Le grands groupes de protection sociale et de prévoyance entendent bien entrer de plain-pied dans l'ère numérique et pour y parvenir, plusieurs acteurs ont développé leurs propres offres en e-santé.
Si, comme dans de nombreux secteurs, le numérique transforme le métier d'assureur, le véritable intérêt de ces derniers pour la santé connectée émane certainement du poids de ce marché, qui devrait peser 400 milliards de dollars en 2022, selon le cabinet Grand View Research.
Interrogé par TICpharma, Minh Q. Tran, ex-directeur du fonds de capital-risque AXA Strategic Ventures, aujourd'hui à la tête du fonds Insurtech Capital, a évoqué "une tendance très claire autour de l’assurance santé connectée". "Les assureurs ont aujourd'hui la capacité de faire de l’assurance personnalisée notamment grâce aux données que l’on peut récupérer de l’usager à travers les objets connectés, et puis cela est plus intéressant d’assurer des personnes en bonne santé", a-t-il expliqué.
Certains assureurs l’ont bien compris. Generali avait d'ailleurs soulevé une vive polémique en septembre 2017 après le lancement de son programme Vitality, qui proposait aux assurés au mode de vie sportif et vertueux de cumuler des points et d'obtenir des récompenses auprès des partenaires de Generali (tels que Club Med, Look Voyages, Wedoogift, Sephora, Fnac et Decathlon), après avoir apporté la preuve de leur activité physique régulière via des objets connectés, par exemple.
Dans un communiqué publié le 8 février, Nokia Health a annoncé un partenariat avec Generali sur le programme Vitality, afin de proposer ses objets connectés de santé aux assurés du groupe. "Au côté de Generali, Nokia veut continuer à sainement banaliser les objets connectés pour encourager une vie plus saine", a déclaré Alexis Normand, directeur B2B chez Nokia Health.
Generali n'est pas le premier groupe de protection sociale avec lequel travaille Nokia Health.
En 2014, AXA avait choisi de récompenser les plus actifs de ses assurés, après un partenariat avec la société spécialisée dans les objets connectés de santé et bien-être Withings (devenu Nokia Health après son rachat par Nokia en 2017).
Le principe? Les assurés qui avaient souscrit à la complémentaire Modulango recevaient un podomètre Pulse 2 de Withings et à partir de 7.000 pas par jour, ils se voyaient remettre un chèque "médecine douce" d’une valeur de 50 € à faire valoir auprès de professionnels de santé ainsi que 15% de remise sur un produit de la gamme Withings. S'ils atteignaient les 10.000 pas, la mise doublait.
Au-delà de Withings, AXA multiplie les annonces de rachat ou de partenariat avec des start-up de e-santé.
Le 18 janvier, le groupe français s'est associé à la pépite américaine de l'insurtech Oscar Health pour booster le développement de la jeune pousse et, dans le même temps, s'inspirer de ses offres: l'application mobile d'Oscar Health permet d'échanger avec un médecin gratuitement en moins de 10 minutes. Nouvelle offensive le 22 janvier avec l'acquisition, pour 155 millions d'euros, d'une société américaine de gestion numérique des couvertures de santé, Maestro Health.
Interrogé par TICpharma, le groupe d'assurance n'a pas souhaité communiquer.
Miser sur la créativité des start-up de e-santé
Dans une étude du cabinet PwC publiée en juin 2016, 43% des acteurs du secteur de l'assurance affirmaient intégrer les start-up spécialisées en e-santé au coeur de leurs stratégies.
Près d'un assureur sur deux a pris des mesures pour saisir les défis que présente le boom de la digitalisation de leur activité.
L’étude de PwC recommandait d'ailleurs aux assureurs de respecter 4 étapes pour ne pas rater leur transformation numérique:
- assurer une veille permanente pour dénicher les nouvelles tendances du marché de la santé connectée
- nouer des partenariats stratégiques pour tirer profit de la créativité des start-up spécialisées
- intégrer ces jeunes pousses dans leur écosystème via des programmes d'incubation ou d'accompagnement
- développer des nouveaux produits avec ces start-up pour diversifier le portefeuille "maison".
"Les assureurs veulent soutenir les start-up de e-santé, intégrer des plateformes de santé en ligne ou assurer les objets connectés de santé", a observé Minh Q. Tran.
"Assurer les objets connectés répond au besoin de collecter des données pour proposer une offre personnalisée; les plateformes de santé connectée sont, elles, un nouveau canal de distribution pour les assureurs qui peuvent toucher une plus grande cible d'assurés potentiels; et le soutien aux start-up de e-santé permet d'enrichir leur portefeuille de produits", a-t-il ajouté.
Le groupe de protection sociale Malakoff Médéric a ainsi annoncé en octobre 2017 la création d’un fonds d’investissement de 150 millions d'euros pour coacher des start-up innovantes, notamment dans la e-santé.
AG2R La Mondiale joue, lui, sur plusieurs tableaux.
L'assureur a lancé en janvier dernier, par le biais de sa mutuelle Viasanté et son partenaire IoT Valley (le cluster toulousain de start-up spécialisées dans l'internet des objets), un appel à candidatures auprès de start-up d'e-santé avec l'objectif de favoriser l'émergence de nouveaux services et solutions issus des objets connectés.
Il s'agissait plus précisément de rechercher de nouvelles solutions connectées pour améliorer l'observance des traitements et faciliter la vie quotidienne des personnes atteintes de diabète.
"L'assurance santé est en pleine évolution. Nous sommes dans un secteur devenu à la fois très concurrentiel et de plus en plus normé dans son offre purement assurantielle, donc les acteurs cherchent à se différencier les uns des autres en développant une offre de services", a analysé Cécile Waquet, directrice adjointe métier santé prévoyance d’AG2R La Mondiale, auprès de TICpharma.
"Il y a un marché émergent avec l'essor du numérique et nous sommes en train d'inventer l'assurance de demain, qui répond aux nouvelles attentes de la société", a-t-elle expliqué.
Le défi pour AG2R La Mondiale -et, de façon générale, pour l'ensemble des assureurs- est de formuler une offre de services innovante qui réponde à chaque segment de clientèle (actifs jeunes ou seniors, salariés de petites ou grandes entreprises, indépendants, retraités...) et d'adapter cette offre à chaque étape de la vie des assurés et aux spécificités des différents secteurs professionnels.
"La santé connectée est une offre de services qui répond à un besoin exprimé par les assurés dans une période où les comportements changent et nous le constatons s'agissant de la prévention et du 'bien-vivre' et 'bien-vieillir'", a observé Cécile Waquet.
D'ailleurs, AG2R La Mondiale propose aussi à ses assurés de cumuler des points... mais pas pour eux. Via son application baptisée Vivons vélo, lancée en 2015, le groupe de prévoyance a lancé un programme "solidaire", axé sur la promotion de la pratique du cyclisme à travers des conseils (parcours, défis à relever, programme de coaching, conseils pour débuter, des sorties à vélo...). Les assurés peuvent ainsi cumuler des points qui se transforment en dons pour l’Institut Pasteur.
Une stratégie axée sur la prévention
"L’assurance dans le passé était défensive. Elle se veut aujourd'hui collaborative et à l’avenir, les assureurs veulent investir dans des technologies de prévention", a souligné Minh Q. Tran. "Il y a une volonté stratégique de la part des assureurs d’être en amont de la relation client. L’assurance ne veut plus devenir un payeur mais un partenaire de la santé de ses assurés grâce à la santé connectée", a-t-il ajouté.
Ainsi, au lieu de ne communiquer que par le biais de la facturation des actes médicaux, ils peuvent réaliser des économies en privilégiant la prévention, qui, après quelques investissements nécessaires, sera moins coûteuse.
+Si la prévention est la clé pour réduire les sinistres, elle permet aussi à l’assureur d’avoir "un positionnement plus sociétal", a indiqué l’expert. "Prévenir des situations de burn-out ou développer des serious games est une démarche positive pour les assureurs comme pour les assurés."
A l'automne 2016, AG2R La Mondiale a lancé un kiosque d'applications mobiles de santé labellisées par la société Medappcare. L'idée était alors d'orienter les patients dans leur choix d'application mobile d'e-santé.
Là encore, le groupe de protection sociale mise sur la prévention -et donc, a priori, sur des économies potentielles de dépenses de santé et de prévoyance. La catégorisation du kiosque est sans équivoque, car trois des quatre entrées sont destinées à la prévention:
- "Je reste en forme"
- "Je prends soin de ma famille"
- "Je me soigne"
- "Je reste actif et autonome".
Et si l'assuré est un "mauvais patient", peut-il être sanctionné?
"Nous ne sommes absolument pas dans une logique de sanction, ni de bonus-malus. L'idée est de coller aux nouveaux usages, ce qui devrait à terme permettre une moindre dépense en matière de soins curatifs et de prévoyance mais il faudra étudier de près ce modèle économique", a précisé la directrice adjointe métier santé prévoyance d’AG2R La Mondiale
Autre axe pour limiter les dépenses: la télémédecine et la téléconsultation, qui s'imposent également comme des incontournables pour les assureurs.
"Nous sommes en train de développer des offres de téléconsultation médicale pour permettre à nos assurés d’échanger avec un médecin par téléphone ou visioconférence, ce service étant devenu un standard de marché", a d'ailleurs expliqué Cécile Waquet. "La téléconsultation répond aux attentes de certains assurés, par exemple dans les zones rurales, mais aussi pour ceux qui ne peuvent pas se rendre dans les cabinets aux horaires d’ouverture."
Outre AG2R La Mondiale, le groupe international d'assurances Allianz, via son fonds d'investissement pour le digital AllianzX, a injecté 59,2 millions de dollars dans la plateforme américaine de télémédecine American Well.
De son côté, la Maaf va encore plus loin et propose un service de réalité virtuelle via la plateforme technologique du Centre de réalité virtuelle de la Méditerranée (CRVM). Ainsi, les assurés volontaires et acrophobes (qui ont peur du vertige) peuvent s’équiper de lunettes 3D et de capteurs pour vaincre leur peur.
La réalité virtuelle, le futur axe de développement des assureurs?
Wassinia Zirar
GOOGLE TRANSLATION
PARIS (TICpharma) - Kiosks of connected health applications, teleconsultation services, coaching of e-health start-ups ... the big names of social protection are jostling in the digital health market. True perennial ambition or simple fashion effect?
The large social protection and welfare groups intend to enter the digital age and to achieve this, several players have developed their own e-health offers. If, as in many sectors, digital transforms the profession of insurer, the real interest of the latter for connected health certainly emanates from the weight of this market, which should weigh 400 billion dollars in 2022, according to the firm Grand View Research.
Interviewed by TICpharma, Minh Q. Tran, former General Partner of the venture capital fund AXA Strategic Ventures, today head of the Insurtech Capital fund, spoke of "a very clear trend around connected health insurance". "Insurers today have the ability to make personalized insurance thanks to the data that can be retrieved from the user through the connected objects, and then it is more interesting to ensure people in good health. "he explained.
Some insurers have understood this well. Generali had also raised heated controversy in September 2017 after the launch of its Vitality program, which offered policyholders with a sporting and virtuous lifestyle a chance to earn points and win prizes from Generali's partners (such as Club Med, Travel Look, Wedoogift, Sephora, Fnac and Decathlon), after proving their regular physical activity via connected objects, for example.
In a statement released on February 8, Nokia Health announced a partnership with Generali on the Vitality program, to offer its connected health objects to the group's policyholders. "At the side of Generali, Nokia wants to continue to healthyly trivialize connected objects to encourage a healthier life," said Alexis Normand, B2B director at Nokia Health. Generali is not the first social protection group with which Nokia Health works.
In 2014, AXA chose to reward the most active of its policyholders, after a partnership with the company specializing in connected objects of health and well-being Withings (now Nokia Health after its acquisition by Nokia in 2017). The principle? Insured persons who had subscribed to the Modulango supplement received a Pulse 2 pedometer from Withings and from 7,000 steps per day, they were given a "soft medicine" check worth € 50 to make to healthcare professionals. as well as 15% off a product in the Withings range. If they reached 10,000 steps, the bet doubled. Beyond Withings, AXA is multiplying its buyout or partnership announcements with e-health start-ups.
On January 18, the French group joined the American nugget insurtech Oscar Health to boost the development of the young shoot and, at the same time, take inspiration from its offers: the mobile application of Oscar Health allows you to talk to a doctor for free in less than 10 minutes. New offensive on January 22 with the acquisition, for 155 million euros, of an American company of digital management of health covers, Maestro Health.
When questioned by TICpharma, the insurance group did not wish to communicate.
Banking on the creativity of e-health start-ups
In a study published by PwC in June 2016, 43% of insurance industry players said that integrating e-health start-ups into the heart of their strategies. Nearly one insurer out of two has taken steps to grasp the challenges presented by the digitalisation boom of their business.
PwC's study also recommended that insurers respect 4 steps so they do not miss their digital transformation:
- ensure a constant watch to find new trends in the connected health market
- forge strategic partnerships to take advantage of the creativity of specialized start-ups
- integrate these young shoots into their ecosystem through incubation or support programs
- develop new products with these start-ups to diversify the "home" portfolio.
"Insurers want to support e-health start-ups, integrate online health platforms or insure connected health objects," observed Minh Q. Tran. "Ensuring connected devices responds to the need to collect data to deliver a personalized offering, connected health platforms are a new distribution channel for insurers who can reach a larger target of potential policyholders, and support e-health start-ups can enrich their product portfolio, "he added.
The social protection group Malakoff Médéric thus announced in October 2017 the creation of a 150 million euro investment fund to coach innovative start-ups, particularly in e-health. AG2R La Mondiale plays on several levels. The insurer launched last January, through its mutual Viasanté and its partner IoT Valley (the Toulouse cluster of start-ups specialized in the Internet of Things), a call for applications from e-start-ups. -health with the objective of promoting the emergence of new services and solutions from connected objects. More specifically, it aimed to find new connected solutions to improve treatment adherence and make life easier for people with diabetes. "Health insurance is evolving: we are in a sector that has become both highly competitive and more and more standardized in its purely insurance offer, so the players are seeking to differentiate themselves from one another by developing a range of services. ", analyzed Cécile Waquet, deputy director of occupational health and safety at AG2R La Mondiale, with TICpharma.
"There is an emerging market with the rise of digital and we are inventing the insurance of tomorrow, which meets the new expectations of society," she said. The challenge for AG2R La Mondiale - and, in general, for all insurers - is to formulate an innovative service offering that responds to each customer segment (active young or old, employees of small or large companies, independent, retirees ...) and to adapt this offer to each stage of the life of the insured and to the specificities of the various professional sectors. "Connected health is a service offering that responds to a need expressed by the insured in a period of changing behavior and we see it in terms of prevention and 'well-being' and 'aging well'", observed Cecile Waquet. Moreover, AG2R La Mondiale also offers its policyholders to accumulate points ... but not for them. Through its application called Vivons vélo, launched in 2015, the provident group has launched a "solidarity" program, focused on promoting cycling through advice (pathways, challenges, coaching program, tips for getting started). , bike rides ...). Insured persons can accumulate points which become donations for the Institut Pasteur.
A strategy focused on prevention
"Insurance in the past was defensive, but now it's collaborative, and in the future, insurers want to invest in prevention technologies," said Minh Q. Tran. "There is a strategic desire on the part of insurers to be upstream of the customer relationship: insurance no longer wants to become a payer but a partner of the health of its policyholders thanks to connected health", he said. Thus, instead of communicating only through the billing of medical procedures, they can achieve savings by focusing on prevention, which, after some necessary investments, will be less expensive. If prevention is the key to reducing claims, it also allows the insurer to have "a more societal positioning," said the expert. "Preventing burnout situations or developing serious games is a positive step for both insurers and policyholders.
In autumn 2016, AG2R La Mondiale launched a kiosk of mobile health applications labeled by Medappcare. The idea was then to guide patients in their choice of e-health mobile application. Here again, the social protection group focuses on prevention - and therefore, a priori, on potential savings in health and welfare costs. The categorization of the kiosk is unequivocal, as three of the four entries are intended for prevention: "I stay in shape" "I take care of my family" "I treat myself" "I remain active and autonomous". And if the insured is a "bad patient", can he be punished? "We are absolutely not in a logic of sanction or bonus-malus.The idea is to stick to new uses, which should eventually allow less expenditure in terms of curative care and foresight but it will be necessary to study close to this economic model, "said the deputy director occupational health business of AG2R La Mondiale Another axis to limit expenses: telemedicine and teleconsultation, which are also essential for insurers. "We are developing medical teleconsultation offers to allow our insured to exchange with a doctor by phone or videoconference, this service has become a market standard," said Cecile Waquet. "The teleconsultation meets the expectations of certain policyholders, for example in rural areas, but also for those who can not visit the offices during opening hours." In addition to AG2R La Mondiale, the international insurance group Allianz, via its investment fund for digital AllianzX, has injected $ 59.2 million into the US platform American Well of telemedicine. For its part, Maaf goes even further and proposes a virtual reality service via the technological platform of the Center for Virtual Reality of the Mediterranean (CRVM). Thus, voluntary volunteers and acrophobes (who are afraid of vertigo) can equip themselves with 3D glasses and sensors to overcome their fear. Virtual reality, the future axis of development of insurers?
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